Rêve éveillé

Le soleil se lève, une nouvelle journée commence. Derrière cette phrase d’une banalité sidérante se cache pourtant une des clefs de l’espèce humaine.

Ce simple fait découle de l’observation physique. Des animaux se sont réveillés, d’autres se sont couchés, les végétaux se sont adaptés. Cette boule de feu a fait l’objet de beaucoup d’intérêts pour les humains : mystiques, religieux, scientifiques. Et pourtant, ce levé de soleil est devenu si commun, si naturel, qu’il passe inaperçu dans notre vie moderne : il a perdu son caractère mystérieux. La science nous a permis de le connaître, de le cerner et de vivre avec. Au revoir les vieilles superstitions, au revoir les anciennes idées issues de l’imagination humaine devant ce phénomène aujourd’hui décortiqué. Bien entendu, nous ne savons pas tout de cette famille d’astres qui nous éclairent, chauffent. Et c’est justement là que cela devient intéressant.

Le comportement des humains face à des événements inconnus est diversifié : certains vont y voir l’expression d’une puissance supérieure, d’autres vont chercher à les expliquer, ou bien d’autres vont simplement les ignorer. Dans les deux premiers cas, l’imagination a un rôle prépondérant : imaginer quelque chose que l’on ne connaît pas, imaginer pour expliquer. Cette imagination est un reflet de la pensée, et pour les humains, elle est directement liée au cogito ergo sum. Enfin, elle est déclinable de plusieurs façons.

Le rêve n’est-il pas une forme d’imagination ? Expression de l’inconscience pour certains, il nous arrive fréquemment de pouvoir retenir des bribes de nos rêves endormis, bribes irréelles et imaginées. Cette imagination n’est pas l’objet de notre volonté et d’une certaine manière, nous les subissons. Toutefois, nous arrivons à réaliser le caractère irréel de nos rêves à l’aide d’un référentiel réel issu de notre conscience : voler comme superman, on peut en rêver et mais cela n’apparaît pas acceptable à notre conscience de ce qui est réel.

Ce référentiel du réel n’est pas quelque chose de fixe : il varie. Il dépend de notre capacité d’observation et cette dernière a ses limites. Au delà de ces limites, l’imagination est là. Reprenons l’exemple du soleil, aujourd’hui, nous avons une plus grande capacité d’observation à son propos que par le passé et l’imagination que l’on lui associe a changé.

Ce référentiel n’est pas complet et cette non-complétude est la base de notre existence et de l’imagination : l’infiniment grand, l’infiniment petit, l’existence. Si notre référentiel d’observation était complet, nous serions capable de tout observer, de tout expliquer. Or, si il y a quelque chose de fondamental, c’est que nous n’en sommes pas capable, et même qu’il est souhaitable de ne pas en être capable. Sinon, où serait l’étincelle qui nous pousse à aller de l’avant ? Le point le plus important est que notre référentiel du réel n’inclut pas notre existence. Nous ne savons pas les comment et pourquoi de notre existence. Et malgré la conscience de cette dernière, nous sommes obligé d’imaginer sur notre propre identité. Alors, entre une identité que l’on imagine, un référentiel du réel que l’on croit (imagine) réel, la place de l’imagination chez l’humain est fondamentale. Notre existence pourrait être un rêve éveillé inconscient (différent d’une expression de l’inconscient).

L’imagination permet de dépasser le réel. Un exemple : les fictions. L’imagination nous permet de croire, de s’identifier et de s’insérer dans des univers virtuels. L’identification à des personnages fictifs (séries TV, films, livres …), c’est à dire s’imaginer à leur place ou bien imaginer de vivre dans un autre univers (science fiction par exemple), dans ces deux cas, l’imagination nous permet de dépasser le cadre de notre propre existence et ce de manière volontaire : un rêve éveillé conscient.

Il arrive que la frontière entre ceux deux types de rêves soit confuse : il arrive que des personnes se perdent dans leurs rêves (exemples par rapport aux jeux de rôles). Ne serait-ce pas le résultat d’une volonté de notre société de tout expliquer même l’inexplicable ?

Life is not a mystery to solve, but a reality to experience. (Frank Herbert, Dune)

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