En 2002, Richard K. Morgan publie son roman de cyberpunk Altered Carbon. Après plusieurs tentatives d’adaptation, c’est finalement Netflix qui y arrive sous le format d’une série.
Je vais revenir ici sur la première saison.
Nous sommes dans un univers futuriste très déroutant : au 24ième siècle, l’immortalité est possible : la conscience peut en effet être stockée dans un disque positionné à la base de la nuque. Et si le corps meurt, le disque peut être inséré dans un autre corps. Par contre si le disque est abimé, cela correspond à une vraie mort… sauf si des sauvegardes ont été réalisées. Et quand bien même le disque serait intact, il faut trouver un corps, une enveloppe cible sous peine de rester en stockage/hibernation. Les transferts peuvent se faire dans des corps ne respectant ni l’âge, ni le genre, ni la couleur de la personnalité originale. La relation à l’autre est ainsi obligée de dépasser les apparences.
Dans cet univers, la richesse achète la vraie immortalité avec des copies et des clones à disposition. Ces immortels sont les seigneurs de ce « protectorat » et le dominent.
Nous suivons le personnage Takeshi Kovacs qui est sorti du stockage et inséré dans une enveloppe sur demande de l’immortel Laurens Bancroft. Ce dernier a été victime d’une tentative de meurtre. Bancroft, toujours vivant grâce à une sauvegarde effectuée 48h plus tôt, n’a pas de souvenir sur l’incident. Il compte sur Kovacs et ses qualités physiques et mentales pour découvrir la vérité.
3 arguments pour voir cette série ?
Le premier argument concerne l’univers de la série et sa représentation visuelle. Tout simplement sublime ! Nous plongeons corps et âme dans un futur qui fait peur et qui pose questions. On peut observer les différentes strates de cette société cyberpunk, des pauvres luttant pour prolonger leur survie jusqu’aux riches dans leur palace au-dessus des nuages. L’omniprésence de la technologie, le changement des relations sociales, la mise sous tutelle de la société, c’est brillamment représenté avec des richesses de décors et photographies fascinantes.
Le second argument est le scénario très malin et très riche. De manière générale, le fait d’être une adaptation d’un roman aide à structurer un univers et des personnages cohérents. C’est une intrigue policière mais c’est aussi une découverte de cet univers par le personnage principal qui est resté en stockage un grand nombre d’années. Les personnages sont au service de l’intrigue et j’ai personnellement été dedans du début à la fin.
Le troisième argument est lié à de nombreux détails comme le personnage Edgar Poe qui est une intelligence artificielle en tant qu’entité hôtel, comme la place de la religion dans cet univers d’immortels, comme la perte de sens pour des vies moins limités dans le temps, comme la confusion d’identité pour soi et ses proches liée au transfert dans une nouvelle enveloppe corporelle…
3 contre-arguments ?
Le premier contre argument est lié à la noirceur de cet univers et sa complexité qui peut effrayer au départ. Il n’est pas facile de rentrer dedans. Cela fait aussi partie de la volonté de partager la confusion du personnage principal. C’est aussi un univers assez violent où le rapport à la mort change (la vraie mort est d’autant plus insupportable qu’elle est évitable) et où le sentiment de survie est plus fort et intense.
Le second contre argument est lié à l’interprétation du personnage Kovacs par Joel Kinnaman. L’acteur a une superbe plastique mais il est très avare dans ses émotions et leur expression. C’est voulu mais le décalage entre la personnalité de Kovacs (que l’on découvre avec des souvenirs flashbacks) et sa nouvelle enveloppe m’a un peu laissé sur ma faim.
Le troisième contre argument est lié à certains raccourcis : nous sommes dans un univers multi planétaires mais on n’en voit pas beaucoup d’éléments. De plus, le système de sauvegarde de disques et de leur mise en place n’est pas vraiment évoqué de manière détaillée.
Alors, au final ?
Pour moi, cette première saison est parfaitement réussie et nous emmène dans un univers cyberpunk original, avec une belle enquête et des réflexions philosophiques intéressantes. C’est beau, intelligent et parfois un peu lourd : j’en redemande ! Ce sera donc un 4,5/5.